La génèse


Ce matin d’octobre 2010, un matin comme beaucoup d’autres, La ville est silencieuse, Honfleur a retrouvé sa quiétude en libérant ses touristes estivant. La cuillère tournant dans mon café fait écho à mes pensées. L’esprit légèrement embrumée comme l’est souvent l’estuaire de la seine en automne, le souvenir de discutions avec Sandrine, mon épouse, la veille et depuis quelques mois, notre désir d’aller voir « plus loin » en nous et sur la terre.
Partir …en famille, nous la cinquantaine naissante, notre fils de quatre ans...
... il est temps.

La décision est prise, nous levons l’ancre, du moins dans nos rêves, car pour le moment mon café fume, ma tête aussi et mes fesses s’enfoncent dans le fauteuil. Mes pensées font le va et vient entre l’analyse d’éléments objectifs et les rêves les plus osés.
Après avoir envisagé, un temps, notre expatriation dans quelques contrées hospitalières pour une implantation terrestre, le choix du bateau s’est rapidement imposé. Pour être marin dans l’âme depuis de nombreuses années, j’ai réussi à inoculer le virus salé aux membres de la famille. Certes, si les quelques navigations estivales communes sur notre petit croiseur ont donné le goût du large, envisager une vie au fil de l’eau est une autre aventure.

Dans le vieux bassin, notre élégant voilier de 26 pieds nous observe de son grand âge et ne se voit pas nous accueillir tous trois au-delà de quelques jours en version camping et pêche à longueur de journée pour Valentin. Pour le grand large nous sommes priés d’aller voir plus grand.
A partir de maintenant, le café avalé, les neurones connectés, la liste des questions s’allonge dans une frénésie tant bien que mal maîtrisée. Mince, il va falloir bâtir un projet et prendre un minimum de temps afin d’explorer tous les aspects de notre vie future pour que le rêve devienne notre réalité.

Où ? Quand ? Comment ? Combien de temps ? Telles sont les questions.
Les candidats au départ sont nombreux. Peu arrivent à prendre la bonne marée, tant les écueils sont nombreux. Tout d’abord, il va falloir quitter la vie sociale de nos communautés sécurisées qui nous pousse à respecter certains codes, notamment celui du petit écran pour vivre l’aventure par procuration et le lendemain, retrouver ses collègues pour faire tourner la machine.

Convaincre les proches, si possible, que ceci n’est pas une illumination de la nuit passée, mais un projet mûrement réfléchi. L'inquiétude légitime des gens qui vous aiment, l'éloignement et plus généralement la peur du changement et de l'inconnu, génèrent une avalanche d'arguments négatifs, de prime abord, auxquels il faut apporter des réponses pour rassurer tout le monde et peut être aussi pour se rassurer soi-même. Une fois passé l'épreuve, les réponses validés, l'adhésion et même le soutien sont souvent au rendez vous.
Après tout, quel être sensé partirait sur les océans sur une coquille de noix alors qu’il est conçu pour vivre sur la terre ferme ?

Je me souviens que j’avais posé cette question à mon tandem de parachutiste accroché dans mon dos, pour mon baptême, au moment de basculer dans le vide.
Pourquoi sauter, à 4000 mètres, d’un avion en parfait état de marche ? Je n’ai pas entendu la réponse…

Il faut croire que l’être humain possède en lui cette faculté d’aller au-delà de ses savoirs pour explorer l’inconnu. Après tout, nous vivrions toujours dans des cavernes humides et glaciales si un être plus téméraire que les autres ne s’était approché du feu.
Loin de la guerre du feu, ce projet nous emmènera, néanmoins, en mer inconnu, nourri par les vagues d’émotions glanées lors de nos rencontres, ancré de somptueux paysages, enrichi par une meilleur connaissance de nous-même. Le partage de moments forts, bons ou moins bons, en famille.
Abreuvé d’ « histoire de partir » (excellent) et autres récits d’aventure, nous voulons notre part du rêve.

Nous voulons vivre le temps de l’aventure et ne pas ramener que des photos et souvenirs pour touristes.

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